Chère courageuse maman,
Je prends le clavier quelques jours après le sevrage de ma Luciole. Cette étape marque un grand clap de fin et un tournant dans ma vie de maman et dans ma vie de femme.
J'ai trop tiré. J'ai été trop loin et c'est dommage. Parce que la manière dont ça s'est fait me remplit de tristesse. Mais laisse-moi remonter le temps pour te raconter cette histoire de nénés depuis le début.
On remonte à la grossesse de ma Grenouille, il y a cinq ans. Je commence à m'intéresser à l'allaitement, à voir tous ses bienfaits et je décide d'allaiter sans me mettre de pression. "On verra si ça marche", que je disais à l'époque. Les premiers jours ont été un calvaire. Il prenait mal le sein, avait la mâchoire rétrognate. On a vu un ostéo. J'ai tiré du lait à la main, lui ai donné dans une cuiller. J'ai pleuré, surtout la nuit, impuissante, désoeuvrée.
Au bout de quelques jours, il a compris. Et moi j'ai décompressé. Oui, car on a beau dire qu'on ne veut pas se mettre la pression, on se la met quand même! Ca n'a pas été facile pour autant. On a bien galéré le premier mois. Le temps de prendre nos marques, l'un et l'autre. De découvrir comment s'installer au mieux, d'apprendre à être prévoyante (méthode du tout à portée de main!). Puis est venu le temps de nos premières escapades. Des premiers seins à l'air et l'apprivoisement des tétées en public.
Petit clin d'oeil ici à celles et ceux qui m'ont déjà vu jongler avec la Luciole: il m'a fallu du temps avant d'en arriver à une telle dextérité...
Et ça a continué comme ça, un mois, deux mois, trois mois, six mois, "tant que ça roule, on continue"... Puis la Luciole s'est pointée. Son frère a été le premier au courant. Il l'a senti tout de suite et je n'ai compris l'origine de ses crises soudaines que quand j'ai su moi-même que j'étais enceinte.
Ma lactation a chuté, ma fatigue augmenté. J'ai envisagé un co-llaitement mais j'ai rapidement renoncé. Il me restait donc quelques mois avant l'arrivée de notre Luciole pour sevrer son frère.


Six mois plus tard, c'était reparti!
La Luciole a montré le bout de son nez et dans les deux heures, elle tétait goulûment. J'étais moi-même beaucoup plus à l'aise même si il a fallu se ré-adapter au format nouveau-né. Un démarrage parfait. Cette fois, j'avais une idée en tête: 2 ans! Elle les aura en octobre. Je ne suis donc pas arrivée à mon "objectif" mais c'est loin d'être important.

C'était il y a quelques mois. Et dimanche dernier, c'était la tétée de trop. Le soir, après l'histoire, elle mâchouillait sans téter vraiment. C'était désagréable, je voulais juste me rhabiller. Je l'ai repoussée et déposée dans son lit, déboussolée. Elle a pleuré beaucoup. Je suis sortie de la chambre, coupable, nulle, dépitée, triste. Puis je suis revenue pour lui expliquer. Et quand enfin elle s'est assoupie, calmée, résignée, la décision était prise: il n'y aurait plus d'autre tétée, ni le matin, ni au retour de crèche, ni le soir, ni à chaque bobo, frayeur ou fringale.
J'ai pleuré beaucoup et ressenti une profonde tristesse. Que tout soit fini. D'avoir mal vécu cette dernière tétée. D'avoir pris une décision aussi unilatérale et brutale. Mais c'était devenu trop, d'un coup. Elle a 22 mois. Elle refuse absolument tout biberon, tout lait. Elle est têtue. Mais contre toute attente, elle a accepté très facilement de se passer de téter en journée. "Pas téter, pas téter", qu'elle me répétait. Le deuxième soir a été compliqué et puis c'était fini. Je lui ai expliqué qu'elle était grande, que son frère était passé par là aussi. Et depuis, elle s'endort seule dans la chambre, comme lui. Je suis fière d'elle.
Je suis fière de mes deux arsouilles et de mes deux nénés. Fière du chemin parcouru avec eux. Fière de moi. D'avoir tenu bon dans les moments difficiles et dans les périodes de sevrage. D'avoir affronté des regards en public, les remarques et les "jusque quand?", d'avoir contribué à la normalisation d'un allaitement long. D'avoir donné de moi, de mon corps, de mon énergie à nourrir mes petits. De leur avoir donné tout ce que j'avais de meilleur.
Nous n'aurons pas de troisième enfant. C'est donc ici que se clôt un gros chapitre de ma maternité. Il me reste à accueillir avec reconnaissance ce corps transformé. Ne pas "constater les dégâts" mais garder envers lui une gratitude infinie pour ce qu'il m'a permis de faire et de donner.
Chère maman, c'est un sacré pavé que je te partage là, mais il n'y a pas un mot que je tairais sur cette incroyable aventure.
Je te souhaite, courageuse maman, d'être toujours en phase avec tes choix d'allaitement, de biberonnage, de sevrage. Car toi seule sait et ressens ce qui est juste pour ton enfant, évidemment, mais aussi pour toi.
Ne t'oublie pas.
Ne t'oublie pas.


1 commentaire
C’est fou comme on peut se sentir coupable de voimuloir juste retrouver notre corps et notre autonomie tout en étant une maman aimante. Je suis dans cette phase de sevrage pas facile. Je craque encore pour qu’elle dorme ou s’apaise. Courage aux mamans que nous sommes.